Effet Mc Gurk / Dyslexie / Proprioception
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L’effet Mc Gurk, vous connaissez ?
C’est une illusion, non pas d’optique, mais auditive. Elle montre à quel point notre cerveau se sert non seulement de ce qu’il entend, mais également de ce qu’il voit pour construire une perception auditive. Et dans le cas des mots prononcés, ce que l’on voit c’est la bouche de la personne qui prononce ces mots.
Or si une personne dit «ba», mais que l’on remplace l’image vidéo de sa bouche par une où il dit «ga», l’image impose à notre cerveau le son «da» et ce, même si l’audio (qui dit «ba») n’a pas changé. Mieux: le seul fait de détourner le regard et de ne plus regarder la bouche nous fait à nouveau entendre le son «ba»! (Attention, vous ne percevrez pas l’effet Mc Gurk si vous souffrez d’une dysperception proprioceptive )
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Un effet McGurk classique consiste à entendre la syllabe /ta/ alors que le locuteur a prononcé /ga/ mais que l’auditeur le voit en train de prononcer /pa/. Cet effet, très robuste chez le sujet normal, a été retrouvé altéré chez le sujet dyslexique, suggérant un déficit de l’intégration multisensorielle. En effet, les dyslexiques, au lieu de l’illusion perceptive normale, ont tendance à prononcer le son perçu visuellement sur le visage du locuteur (Hayes et coll., 2003)*
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L’ effet McGurk a été étudié chez des adultes dyslexiques et normo-lecteurs (9 adultes gardant des séquelles de dyslexie et 10 adultes normo-lecteurs (K. Giraud, M. Habib, C. Liégeois-Chauvel, 2004)**. Cette étude a montré que dans des conditions incongruentes, il y a moins de combinaisons ou de fusions chez les dyslexiques. Cette étude conclut à un déficit d’intégration intermodale chez le dyslexique.
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L’effet McGurk a été étudié chez un groupe de dyslexiques âgés de dix ans et chez deux groupes de normo lecteurs. Pour les stimuli audio-visuels non congruents, les dyslexiques présentent moins d’effet McGurk que les normo lecteurs de même âge mais ne se différencient pas des sujets normo lecteurs de même âge de lecture. L’ensemble des résultats plaide en faveur d’un retard dans la trajectoire développementale des dyslexiques (Mireille Bastien-Toniazzo, Aurélie Stroumza and Christian Cavé,2009)***.
Comme le démontrent les expérimentations ci-dessus, les possibilités de conflits sensoriels existent dès le plus jeune âge, puisque nos sens sont faillibles et peuvent présenter des biais perceptifs importants qui dépendent de multiples facteurs, en particulier d’un trouble de la proprioception.
* = http://www.ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/110/?sequence=28 (p 470)
** = http://www.resodys.org/IMG/pdf/blri13mhabib.pdf (diapos 6 à 11)
****AÉPQ (Guylaine Bédard, Joël Lemaire, Vol 52, N°1/hiver 2014) : « Mieux comprendre la dyslexie »
*****Postura : Traitement de la dysphasie et du retard de langage chez l’enfant
Note 1 : Lire aussi pour plus de détails sur l’effet Mc Gurk l’ article « Les illusions McGurk dans la parole : 25 ans de recherches« (C.Colin, M.Radeau; L’ année psychologique, Année 2003 Volume 103 Numéro 3 pp. 497-542).
Note 2 : Lire aussi « Comment traiter la dyslexie: le traitement proprioceptif » de Joël Lemaire pour plus de détails sur l’effet Mc Glurk et sur le rapport entre dyslexie et proprioception.
Note 3 : Comme pour les enfants dys, l’effet Mc Glurk est réduit pour les enfants autistes (diapo 17 et 18 de la conférence : « Comment les enfants avec autisme perçoivent-ils le monde ? » )